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lundi 4 août 2014

Un bidonville au milieu de Central Park : Hooverville

Par Alabama

Si tu as vu la saison trois de Doctor Who, le nom de Hooverville devrait te dire quelque chose. Sinon, tu es pardonnable.

Le chef badass de Hooverville dans Doctor Who avec un chapeau de cow-boy expliquant le sens du partage
à ses sous-fifres avec une histoire de pain. Pourquoi c'est toujours une histoire de pain ? Pourquoi c'est jamais
une histoire de compote ? JE VEUX DES RÉPONSES. 

Hooverville est un élément capital de la Grande Dépression que nous avons eu tendance à oublier. Comme le Volstead Act, c’est un sujet qui fait partie d’un ensemble historique très complexe, et que l’on se contente d’évoquer sans vraiment l’approfondir. Ma Bible de l’Histoire des Etats-Unis n’en fait même pas mention (je me suis sentie un peu trahie sur le coup).


Oui oui oui, je vous explique le pourquoi du comment de QU’EST-CE QUE C’EST QUE CE TRUC ALABAMA C’EST UNE VILLE SISI OU BIEN ? Hooverville, c’est le surnom que l’on a donné à tous les bidonvilles (donc il n’y en a pas qu’un seul, c’est tous les machins qui s’appellent comme ça) nés aux Etats-Unis après le crash boursier de 1929 (tu sais, le Mardi noir et tout) (si tu sais pas, c'est pas grave : c'est juste une très grosse crise) pour parfois durer jusque dans les années 40. En fonction des lieux, des populations, de l’économie locale et des solidarités, les dates varient : à Central Park, Hooverville a commencé en 1931 pour s’arrêter en 1933 (dans Doctor Who, le Doctor et Martha y arrivent en 1930. Russel T. Davies, t’aurais quand même pu vérifier tes dates.). Court, certes, mais très représentatif du problème. On y reviendra.


En vrai, voilà à quoi ça ressemblait. Non, ça n'évoque pas
vraiment les Etats-Unis.

Pourquoi Hoover ? Hoover n’est pas une marque d’aspirateur (minhinhin !) mais un président des Etats-Unis, que tout le monde a oublié et qui s’en est pris plein la gueule puisque c’est sous son mandat que la Bourse s’est écroulée. Bon, était-ce vraiment de sa faute, ça, c’est une toute autre affaire. Le fait est que Hoover a été perçu comme un do nothing leader. Un chef qui ne fait rien, qui regarde les oiseaux passer, qui se dit que c’est triste, la pauvreté, et qui ne prend pas les mesures nécessaires pour affronter la crise économique. Mais, si tu es étudiant en Histoire, tu le sais, sinon, je te l’apprends : l’Histoire, aujourd’hui, consiste à prendre les méchants et à dire qu’ils étaient gentils, et vice-et-versa. Parce qu’il faut bien qu’on s’occupe. Hoover, c’est pareil. Notre point de vue sur lui a évolué. C’est comme ça que fonctionne l’Histoire : elle ne peut se faire sans recul. Les réactions à chaud sont souvent aveuglées par des sentiments que nous avons aujourd’hui du mal à comprendre. Hoover a réagi. Mais mal réagi. Il a rencontré des hommes d'affaire, des syndicats, et finalement est resté sourd aux voix qui lui demandaient d'utiliser les fonds nationaux pour éviter que l'économie ne plonge avec les cours de la Bourse. Au contraire, se fiant à l'optimisme des consommateurs, il a décidé une réduction d'impôts de 160 millions de dollars, en espérant que les fonds épargnés soient ré-insufflés dans l'économie pour prévenir une nouvelle crise. A l'époque, on a caricaturé cette décision en clamant que... le Président ne fait rien. On lie son nom à tout ce qui touche à la pauvreté : les Hoover cars sont les voitures tirées par des chevaux, faute d’argent pour l’essence, les Hoover leathers sont des chaussures faites de carton, les Hoover blankets sont les journaux détournés en couverture. On a même le Hoover flag : une poche de pantalon retroussée dedans-dehors pour symboliser que… y’a plus de sous.

Mais revenons vers Hooverville. Pour commencer, je te mets une petite vidéo de trois minutes qui résume assez bien la chose. Le problème, c’est que c’est en anglais. Si tu parles anglais, c’est bien, si tu ne parles pas anglais, c’est pas grave, il y a de jolies images, et puis je vais essayer de tout bien expliquer dans mon article.




Que s’est-il passé ? Je suis franchement une pelle en économie, alors on va faire simple (si un économiste passe par là, il a tout à fait le droit d’éclairer ma lanterne qui dormait pendant les cours de SES). Crise. Dans tout le monde du monde en rapport avec la Bourse. Mais aux Etats-Unis, c’est pire qu’ailleurs. La première conséquence : les gens perdent leurs jobs. Du coup, ils perdent leurs maisons. Du coup, ils sont à la rue. Oui, je pratique couramment le syllogisme socratique. Et pour que tout soit bien moisi, des tempêtes de sable traversent le pays et pourrissent les cultures des fermiers. Tous ces nouveaux sans-abri se réunissent en groupe de pauvres (parce que du coup, ils sont pauvres), dorment ensemble, et finissent par s’installer ensemble sur des terrains abandonnés, des quartiers délaissés, des parcs publics, dans des maisons fabriquées avec tout et n’importe quoi. Evidemment, ces villages ne sont pas reconnus par le gouvernement et sont démantelés par les autorités dès que l’occasion se présente. La (le ? Disons « la ») plus grande Hooverville se trouve à Saint-Louis, dans le Missouri, et compte un millier de personnes. Ça fait peur, un peu. Celle de Seattle, située sur le port, est aussi très imposante. Ces bidonvilles jalonnent toute l’Amérique, dans laquelle l’hostilité laisse parfois un peu de place à la sympathie. En juillet 1931, le juge, au lieu d’éjecter vingt-deux chômeurs de la Hooverville de Central Park, suspend la condamnation et leur donne à chacun deux dollars de sa poche. Ça peut paraître peu (et ça l’est), mais ces hommes sont habitués aux travaux à la semaine payés un dollar net d'impôts.

En 1932, un certain Roosevelt se fait élire à la nomination du parti démocrate (tu sais, l’année suivante, il gagne les présidentielles et bidule truc). Déjà trois ans que la crise est apparue, la Grande Dépression est bien avancée. Il veut, entre autres choses, réhabiliter ces hommes et ces femmes oubliés, tapis au fond du parc à droite de l’entrée du métro. J’ai dit que je reviendrais sur ce décalage : Hooverville, ce n’est pas le fin fond de la campagne. Ce sont de grands espaces plus ou moins libres, à côté de chez toi. C’est le port, le parc, un quartier défavorisé. Hooverville, on le voit au quotidien. On ne va pas s’y promener, mais on ne peut pas l’ignorer. Aujourd’hui, les bidonvilles sont sur les bordures du périph. Bon. Imaginez qu’ils soient au milieu du Champ de Mars.


Photo de la Hooverville de Seattle en 1933. 

Voilà l’ambiance. Des jobs à un dollar la semaine, souvent dans le bâtiment ou dans tout autre boulot bien nul, la famine, le froid, un peu de solidarité. On se bat pour un morceau de pain (c’est pas une chanson de Raphaël, ça ?), mais on s’entraide, parce que c’est tout ce qu’il reste. Ce n’est pas très différent de la misère d’aujourd’hui, finalement. On a souvent tendance à penser que dans le dénuement le plus total, les victimes s'unissent contre leur bourreau. C'est là que j'ai bien envie de vous conseiller Si c'est un homme de Primo Levi. Techniquement, ça n'a rien à voir, ça parle des camps de concentration. Mais Levi expose très bien la subtilité des relations humaines dans ces moments de désespoir, qui s'applique en un sens, et dans une moindre mesure, aux Hoovervilliens (oui, là, j'avoue, j'ai inventé le nom).  


Photographie de 1931. D'habitude je fais des blagues dans mes légendes,
mais là c'est trop horrible.

Mais en 1933 arrive Roosevelt. Il est cool, il met fin au Volstead Act (ah oui, je rappelle, on avait officiellement pas le droit de boire : t’as plus d’argent, plus de maison, et même pas le droit à de la Villageoise), et surtout, il propose le New Deal. Le New Deal, c’est un programme économique qui vise à redresser les Etats-Unis. Et, avec leur influence, une bonne partie de l’Occident. Toute cette petite affaire passe par un autre programme, celui du travail permanent, le WPA, pour employer 8,5 millions de personnes. Une plutôt très bonne nouvelle. 

En 1934, c'est un nouveau maire qui arrive à New York : le républicain LaGuardia (Fiorello, pour les intimes). Il arrive dans une ville dévastée. C’est pas du tout le New York de la carte postale que ton grand cousin t’a envoyée y’a deux mois. Il lance une vaste politique de reconstruction et, tout naturellement, Central Park en fait partie. Mais son état est désastreux : les grandes pelouses sont redevenues de la terre, tout est jonché de mauvaises herbes ; en été, le parc est recouvert de poussière, tandis que l’hiver, il se transforme en terrain boueux. Les bancs, s’ils sont toujours là, sont à moitié détruits et les anciennes allées ressemblent à… Eh bien, on ne voit plus vraiment d’allées. LaGuardia a tout reconstruit. Comme vous avez pu le constater, je me suis concentrée sur New York (j'aime bien l'Histoire de cette ville, je sais pas trop pourquoi). Mais, grâce au WPA, une bonne part des Etats-Unis a pu retrouver de ses couleurs durant ces années-là (ce fut un plaisir de te mettre Claude François dans la tête). 

Bien que certaines Hoovervilles se poursuivent jusque dans les années 40, la plupart s'éteignent après le début du New Deal, thank you, holy TARDIS of Gallifrey. Cela ne signifie bien sûr pas que la misère fasse de même. Mais je pense que nous avons suffisamment déprimé pour aujourd'hui. On se retrouve bientôt pour un nouvel article d'Histoire sur les super héros. 

A bientôt mes agneaux !

2 commentaires:

  1. *applaudit* encore un article d'histoire, encore! (le holy tardis of gallifrey m'a tué >.<')

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    1. Merci beaucoup ! Ca fait plaisir de voir que mes références grandioses te font rire :)

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