Par Rainbowl
So proud. |
A la base, je voulais écrire un article lexique LGBT. Et j'ai
renoncé devant l'ampleur de la tâche. Ensuite, j'ai voulu écrire un article sur
l'asexualité, demisexualité, hyposexualité etc., et j'ai encore une fois
renoncé, par peur de me tromper, de dire n'importe quoi. Et me voilà : je
vais vous parler de ce que je connais le mieux, la demisexualité seulement, non
seulement parce que ce terme n'est pas accepté par tout le monde, mais aussi
parce qu'il pose la question de la façon dont on choisit de se définir :
y a-t-il une limite aux « labels » qu'on se donne ? J'ai trouvé
ma réponse, à vous de trouver la vôtre. Mais d'abord, permettez-moi de vous
livrer mon témoignage.
Déjà, qu'est-ce que donc la demisexualité ? Il faut
d'abord définir l'asexualité. Je me permets de citer Aven (un site français sur
l'asexualité) : l'asexualité, c'est ne pas ressentir d'attirance sexuelle
pour autrui. Ce n'est pas de l'abstinence, qui est choisir de ne pas avoir de
relations sexuelles. Une personne asexuelle ne choisit pas d'être asexuelle,
comme on ne choisit pas d'être gay. Ce n'est pas non plus une maladie, un
problème à régler : n'allez pas recommander des sexologues ! Rien ne
dit que nous sommes forcés d'avoir des attirances sexuelles. L'existence de
l'asexualité oblige donc à distinguer l'attirance romantique : on peut
tomber amoureux d'une personne, avoir envie d'être en couple avec quelqu'un sans
pour autant avoir envie d'avoir des rapports sexuels avec elle. On peut être
asexuel, par exemple, et homoromantique, hétéroromantique, biromantique... et
ainsi de suite.
Alors, qu'est-ce donc que la demisexualité ? Eh bien,
comme souvent, certaines personnes se sont rendues compte que ce n'était pas
aussi simple que soit asexuel, soit pas asexuel. Il y a des gens qui ne
correspondent à aucun des deux (spoilers, comme moi). Il y a l'hyposexualité,
où on ressent très peu d'attirance sexuelle, cela peut arriver, mais c'est
rare. Soit dit en passant, j'ai vu sur certains sites que le terme était
controversé... si quelqu'un s'offense, qu'il le dise, et on le supprimera. Il y
a des gens qui n'ont pas de mots spécifiques, qui préfèrent dire qu'ils sont
« gray/grey-A », dans la zone asexuelle, sans être totalement
asexuels. Et puis, il y a aussi la demisexualité : n'avoir d'attirance
sexuelle que pour les personnes avec lesquelles on a noué un lien fort
émotionnel. Rarement donc, en ce qui me concerne, je ne passe pas ma vie à
nouer des liens émotionnels forts.
Très personnellement, étant moi-même demisexuelle, je le
ressens comme cela : la plupart du temps je suis asexuelle. Je n'ai
littéralement aucune envie de m'engager dans une activité sexuelle avec les
gens qui m'entourent. Je peux les admirer physiquement, j'ai déjà flashé plus
d'une fois sur une jolie fille, je peux beaucoup les aimer, mais je n'ai aucune
attirance physique. Et puis, il y a ces quelques personnes, avec lesquelles je
suis proche, et pour lesquelles je ressens une attirance sexuelle. Ces
personnes sont rares donc, et je me suis rendue compte qu'il suffisait que je
perde ce lien précieux pour que l'attirance parte.
Voilà, un meilleur résumé que le mien. |
Je disais au-dessus que ce terme n'était pas accepté par tout
le monde : en effet, certains considèrent que c'est créer des mots pour
des situations qui n'en ont pas besoin. Que c'est se « limiter ».
J'ai compris depuis longtemps que reprocher aux autres d'utiliser trop de mots
pour se définir était souvent un privilège d'hétéroromantique hétérosexuel cis
(=qui s'identifie au sexe qu'on lui a assigné à la naissance, en opposition à
trans), cependant, ce serait généraliser. Ceci étant dit, je m'attache plutôt à
répondre aux asexuels qui auraient l'impression que les demisexuels s'inventent
une oppression, car c'est là le problème principal. En effet, s'identifier à un
mot, c'est rejoindre un groupe. Pourquoi rejoindre un
groupe ? Pour se protéger. Pour revendiquer sa différence. Je l'avais déjà
dit dans mon article sur le coming out : dire que je suis lesbienne, c'est
un acte politique, c'est m'affirmer malgré une société hétéronormative. De la
même façon, dire qu'on est asexuel, c'est avoir le courage de revendiquer une
indifférence vis-à-vis du sexe, alors que nous vivons dans une société où on considère que le
sexe est à la base de tout, la norme dans une relation romantique. Dans ce
contexte, revendiquer d'être demisexuel, c'est insultant pour certains
asexuels. C'est revendiquer d'être opprimé alors que non... je ne suis pas
opprimée. Pourtant, je me revendique demisexuelle sans une once de remord.
Non, je ne suis pas oppressée. Cependant, je n'ai pas
toujours l'impression de correspondre aux catégories qu'on impose sur la
sexualité. Encore une fois, je suis asexuelle presque tout le temps. En fait,
en ce moment, je le suis. Je ne noue pas des relations intimes émotionnellement
forte tous les jours, encore une fois.
Surtout, j'ai besoin de ce mot parce que moi, j'ai besoin de
me définir. J'ai besoin de mettre un mot sur pourquoi je n'ai pas la même
relation avec la sexualité que la plupart des gens que je connais. Parce que je
ne suis peut-être pas vraiment asexuelle, mais je ne suis pas
« sexuelle » non plus. J'ai besoin d'un mot, même si je ne vais pas
organiser des demisexual prides. Et là, ce n'est pas forcément un
acte politique. C'est un besoin, assez humain, de se connaître, c'est
rassurant, quand on sent qu'on n'est pas comme tout le monde. Tout le monde n'a
pas envie de s'identifier avec des mots, j'en ai envie.
J'ai ma réponse. Vous avez le droit de ne pas être d'accord,
mais moi, je suis en paix avec mon identité sexuelle et romantique, et très
franchement, c'est tout ce qui compte.
Pour résumer :
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire