Alors,
je sais que ça fait un petit moment que je n’ai pas écrit d’article, mais mon
cerveau s’était mis en hibernation tout seul et j’étais incapable de faire
quoi que ce soit. Je déplorais qu’il sorte un jour de cette hibernation forcée
et, miracle, il a décidé de passer à la phase décongélation il n’y a pas si
longtemps que ça. Je vais donc vous parler de ce qui a provoqué le
dégel : Ernest.
Les membres du groupe. Et le banjo. |
Je
sais que d’habitude je vous parle de théâtre, de Game of Thrones, de fans et de culture geek. Mais aujourd’hui, je vais vous parler d’un groupe de musique et plus particulièrement, du concert que je suis allée voir le 25 septembre 2014
aux Trois Baudets, en vous passant la partie où je me suis perdue dans la rue.
Alors, contextualisons un peu les choses : lundi, un ami m’envoie un message
me demandant si je suis partante pour un concert le jeudi même. Je dis oui
(j’aime bien sortir un peu dans ma vie) et je demande quel type de musique
c’est. La réponse (et je n’invente rien) a été : « C’est un style rock avec un mélange de vieux Paris et de malsain mais
trop vachement bien. »
Même si je voyais l’ambiance décrite, je suis allée
faire un tour sur la page du groupe, j’ai écouté trois notes et ma première
réaction a été : « Tu m’aurais dit
Steampunk à la française, j’aurais signé direct. ». (J’y suis quand même allée,
d’où le pourquoi du comment de cet article). Ainsi donc, je vais vous parler de
ce groupe et plus particulièrement de leur concert (parce qu’on peut parler
d’un groupe, si on ne le voit pas en concert, on ne peut pas vraiment en
parler). Avant de continuer, je vous invite à aller voir ici pour comprendre un peu de quoi je parle. Je ne vais pas vous faire un article
pour dire « C’est trop génial de la
mort qui tue. » mais plutôt sur le pourquoi du comment ce groupe a de l’avenir et mérite qu’on y prête attention, et tout cela grâce à
un décryptage de leur concert.
Ce
groupe a quelque chose de très intéressant et de très difficile en même
temps : un univers. Ils sont cinq, dont un chanteur, à partager un univers
rock, Steampunk, complètement
hallucinant. La difficulté qui se pose alors est de réussir à imposer cet
univers particulier à leur public et, chose primordiale, à l’imposer par leur
musique. Je ne dirais pas que rares sont ceux qui apprécient l’univers Steampunk, ce serait mentir. Mais en
France, cet univers particulier n’est pas très répandu. Et pour cause :
inspiré d’un Londres victorien, l’univers Steampunk
tire son nom de steam (fumée, vapeur
en anglais) et de punk (sans blague
hein). On va trouver une esthétique copiée sur l’époque victorienne mais avec
un ajout considérable d’une touche séduisante, glamour (notamment une inspiration sortie des cabarets) mais également une prédominance de la classe
anglaise et, surtout, du Steam :
cyborg, machines à vapeur étranges, engrenages sur les vêtements, bijoux,
accessoires. C’est donc un univers très noir mais en même temps très
bariolé de cuivre, de blanc et autres couleurs pâles qui paraissent lugubres par contraste. Eh bien, l’univers d’Ernest c’est ça, c’est du Steampunk à la française. Et ils ont
réussi le pari de créer des chansons originales dans ce curieux mélange de rock
et de Steampunk, en partie grâce à un
piano dont le son a été vieilli type années 50 mais qui fait aussi penser à un
carillon de boîte à musique ou un orgue de barbarie ; tous ces instruments qui
fondent l’univers musical du Steampunk
(sans violon, malheureusement).
Alors
comment ont-ils réussi à élargir cet univers à un concert entier ? Déjà
par leur esthétique qui est très simple et pourtant très travaillée : un
piano au design unique, des guitares électriques retravaillées, décorées, une
batterie qui aura cet aspect steam et
un banjo. Je ne connais pas beaucoup de groupes de musique rock qui ont un
banjo, à part les Dublinners. Mais eux l'ont dans le cadre traditionnel irlandais.
En plus des instruments, chaque membre du groupe a son costume de scène (je
n’aime pas ce terme) qui donne une seconde profondeur à leur univers. Pas de décors,
juste des effets de lumière (on peut s’améliorer sur ce point, mais c’est
minime). Comment donc entrer dans un univers qu’on ne peut pas entièrement se
représenter visuellement ? Par la présence sur scène.
Je
fais une pause pour applaudir. C’est pas facile d’avoir de la présence sur
scène, ça se travaille très dur ou c’est inné. Quand on est acteur, on a un
rôle, un costume, des décors, un texte à défendre. C’est facilité, on nous a
mâché le travail. Quand on est un groupe de musique, on crée à partir de rien,
tout repose sur des brindilles. S’il n’y a pas de présence sur scène, c’est
fichu. Eh bien, permettez-moi de vous dire que la première chose que je me suis
dit au début du concert a été : Il
a une véritable présence sur scène, il sait jouer, il arrive à emmener le
public dans leur univers. Ils iront loin.
Moi j'veux un piano comme ça. |
Alors oui. Le chanteur se transforme sous les yeux du public grâce à un jeu incroyable et complètement déluré : tour à tour épouvantail, Napoléon Bonaparte, antiquaire ou bien marionnette, il fait vivre ses chansons. On retrouve toutes les influences du Steampunk mais remises à jour : d’abord on parle de marionnette (grand thème dans l’imagerie Steampunk où tout est contrôlé et contrôlable), puis on trouve une ambiance cabaret, quoique malsaine et fascinante. Ensuite, on nous fait faire un petit détour avec Napoléon Bonaparte mais toujours pour revenir au point de départ : l’imaginaire. Imaginaire du steam ou imaginaire des contes, tout se recoupe et s’enchaîne, un monde féerique et noir prend vie.
Ce n’est pas uniquement sur la présence du chanteur que tout s’articule mais
principalement sur l’écoute entre les membres du groupe. Il y a une véritable
proximité entre eux, un jeu, ils participent tous à la création et au maintien de l’univers. La musique devient non pas un élément à côté mais participe
réellement à la féerie. C’est donc un curieux mélange entre musique et jeu de
scène, presque une véritable performance d’acteur, avec un véritable dialogue
entre la scène et le public (ce qui est relativement aléatoire, tout dépend du
public et de la salle).
Véritable
esthétique, travaillée et peaufinée, qui pourrait être tirée d’un manga, d’un
comic, d’une série télévisée. Véritable présence sur scène et jeu d’acteur
pouvant faire penser à une pièce étrange et féerique, un conte mis en scène.
Mais véritable présence musicale, assumée et introduite (ne pas uniquement
faire suivre les chansons les unes aux autres, les relier entre elles, ne pas
toujours faire la même chose. Je note au passage la merveilleuse reprise d’Élisa de Gainsbourg, petit clin d’œil
également. Ils ont su donner une nouvelle dimension à la chanson, ils l’ont
intégrée à leur univers sans pour autant la dénaturer, exercice relativement
difficile). Ce n’est pas vraiment une comédie musicale car ça serait presque
une insulte (non pas que je n’aime pas les comédies musicales mais c’est autre
chose), peut-être un conte musicale mais sans pour autant l’être tout à fait.
Alors je vais peut-être paraître trop enthousiaste pour certains, mais je peux
dire que j’ai vu un poème de Victor Hugo prendre vie sous mes yeux.
Un groupe à voir absolument et un article remarquable sur la description des sentiments ressentis au cours de ce concert !
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